La
Vie à Bord
1 :
Les pirates
menaient deux, parfois trois vies différentes. Nombre de ceux qui prenaient
la mer quittaient leur femme et leur famille pour s'en aller faire fortune.
lorsqu'ils rentraient, ils reprenaient la vie de "monsieur tout le monde",
mais une fois à bord, c'était des marins toujours à l'affut de nouvelles
victimes, s'affairant à l'entretien du navire.
Il leur fallait nettoyer les armes (la rouille était un problème constant),
raccommoder les voiles déchirées, briquer les ponts pour retirer le sel
et la saleté, pomper l'eau des bouchains, réparer les cordages et les
espars.
S'ils avaient de la chance, ils rentraient chez eux les poches pleines
d'argent, certains se rangeaient, d'autres dilapidaient leur pécule en
femme et boissons. Certains ivrognes étaient réputés pour dépenser en
une seule soirée le butin de plusieurs années James Plantain, amoureux
des femmes, possedait sur l'Ile Sainte Marie, un véritable harem.
Il parait ses femmes de toilettes et de bijoux somptueux, mais les tenait
bien à l'abri du regard des autres hommes. Les capitaines flibustiers
sont choisis par l'équipage. L'équipage ne lui obéit que s'il a confiance
en ses capacités de commander.
Même si des chefs tels L'Olonnais, Monbars ou De Graaf ne sont pas des
tendres, ils se plient tous à la loi égalitaire des «frères de la côte».
Sans doute parce qu'ils croient en la valeur de leur pacte égalitaire.
Sûrement parce qu'ils voient bien que les flibustiers combattent avec
un enthousiasme supérieur aux soldats traités en inférieurs par leurs
officiers.
Le capitaine
flibustier reçoit une double part du butin.
Rien de plus. Même si le capitaine peut se servir de la cabine du maître,
et utiliser un peu d'argenterie et de porcelaine de Chine, à toute heure
du jour et de la nuit, n'importe quel homme d'équipage peut entrer dans
sa cabine, se servir de son argenterie ou de sa porcelaine.
Le capitaine ne peut l'en empêcher. Dans la bataille toutefois, le capitaine
exerce un réel pouvoir; il peut frapper un homme, même le tuer s'il s'oppose
à ses ordres.
Après le capitaine, l'homme le plus important était le maître.
Le capitaine ne peut rien faire que le maître n'approuve.
Il parle au nom de l'équipage et veille à ses intérêts. C'était en quelque
sorte le magistrat du navire. Il peut juger des délits mineurs, les disputes,
le manque de soin apporté à l'entretien des armes; les fautes graves étaient
jugées par un tribunal. Le maître est le seul autorisé à administrer le
fouet. Toutefois, cette punition étant fort détestée, la décision était
prise par un vote de l'équipage.
Le maître était le premier à monter à bord des navires capturés, il était
responsable du choix des marchandises pillées et de leur répartition.
C'est lui qui dirigeait l'embarcation de bord quand on entreprenait une
action difficile ou dangereuse. Toutefois, il dépendait lui aussi du bon
vouloir de la communauté.
Elu par un vote à la majorité, il pouvait être déposé de même.
Puis, il y avait les officiers.
Parfois ils étaient élus mais le plus souvent ils étaient nommés par le
capitaine et le maître. Parfois, il y avait un lieutenant, dont la seule
fonction consistait à remplacer le capitaine, si ce dernier venait à disparaître.
Autres fonctions
:
Le maître voilier; responsable de la navigation et de la mise en
place des voiles.
Le maître d'équipage; veille à l'entretien du navire (palans, approvisionnement,
bonne marche du travail de tous les jours).
Le canonnier; veille sur l'artillerie, aux exercices de canonnage
et surveille les servants des pièces pendant le combat.
Le charpentier, le
voilier et le médecin. On les appelait les «artistes».
Le médecin passait le plus clair de son temps à soigner les maladies vénériennes.
Lors des batailles, il pansait les blessures et pratiquait les amputations.
S'il n'y avait pas de médecin, le charpentier en remplissait l'office...
Les spécialistes les plus populaires étaient les membres de l'orchestre,
marins ou musiciens enrôlés de force après une prise. Les pirates étaient
enchantés d'avoir un orchestre à leur bord. Ils demandaient sans cesse
aux artistes de jouer une gigue ou une matelote pour les faire danser.
Aussi, ils interprétaient des sérénades pendant les repas pris en commun.
Ces musiciens avaient également un rôle plus pratique pendant les combats.
Ils devaient jouer des airs de marins ou des hymnes guerriers avec des
tambours et des trompettes pour démoraliser l'ennemi et galvaniser l'équipage.
Chez les pirates, on enrôlait parfois de force. Surtout pour les matelots.
Les officiers, eux, se présentaient souvent en grand nombre. De plus,
les pirates ne forçaient jamais un homme marié à les suivre.
Quand on embarquait un homme de force, le maître remettait généralement
à ce dernier un document attestant qu'on l'avait enrôlé contre sa volonté;
la victime pouvait alors recourir à cette pièce, au cas où elle devrait
un jour comparaître devant les tribunaux.
La piraterie en occident, sauf exceptions notoires, est un univers masculin.
Beaucoup d'équipages refusent les hommes mariés, excepté les pirates chinois
qui, eux, peuvent amener leurs femmes sur le navire pour y travailler.
Empilés comme des sardines «Pas un homme ne choisit de devenir marin s'il
n'a assez de talent pour se faire jeter en prison. Parce qu'être sur un
navire équivaut à être en prison avec en plus le risque de mourir noyé.
Et puis, en prison, on est mieux logé, mieux nourri et on se trouve généralement
en meilleure compagnie.» Cette citation résume très bien la condition
du marin de la marine à voile. Et aussi celle du flibustier.
Du moins, en
ce qui concerne le logement. Par nécessité, les navires flibustiers sont
surpeuplés.
L'abordage est la manœuvre principale. Cela exige un équipage très nombreux.
Cette promiscuité oblige à la discipline rigoureuse énoncée dans la chasse-partie.
Jusqu'à 250 flibustiers peuvent s'entasser sur un pont de 40 mètres sur
12 de large.
Ce qui veut dire que chaque flibustier dispose d'aussi peu que 2 mètres
carrés sur le pont du navire . Sans compter la place que prennent les
canons, les cabestans et tous les autres gréements du navire.
L'espace à l'intérieur du navire est encore moindre avec tout ce qu'il
faut emmagasiner des vivres.
En plus, il y fait une chaleur écrasante. Les flibustiers vivent vraiment
coudes à coudes. Au moins, ils bénéficient du grand air... incluant les
pluies tropicales, les tempêtes et le soleil brûlant.