Philosophie
de Vie Chez les Flibustiers et les Pirates :
Il n'y a aucune condition sociale, religieuse
ou nationale au recrutement des flibustiers. L'Europe exporte vers les
îles une partie de ses bas-fonds : repris de justice, domestiques en fuite,
mendiants et opposants politiques ou religieux... qui rejoignent les rangs
de la flibuste. Il suffit d'avoir du courage, de l'endurance, de la férocité
et d'accepter les règles en cours dans la confrérie. Les nobles côtoieront
les mendiants, les illettrés seront les confrères des savants…
Après un abordage, il est courant qu'une
partie de l'équipage capturé passe du côté des flibustiers. Ils savent
qu'ils y seront mieux traités et courent la chance de s'enrichir. En conséquence,
beaucoup de flibustiers sont d'excellents marins, déserteurs des marines
de guerre ou des navires marchands. Et quand les flibustiers manquent
d'hommes, ils vont en trouver là où les travailleurs sont les plus exploités.
Parmi les pêcheurs des grands bancs de Terre-Neuve, par exemple. Pour
ces pêcheurs, comme pour les autres, partir pour les îles est un moyen
de refuser la misère et de sortir de sa condition. Une vision égalitaire,
un contrat social pirate. Dans
les mers des Antilles, la société des flibustiers a développé un caractère
original. Egalitaire, elle se constitue en réaction à la société maritime
strictement hiérarchisée des XVIIe et XVIIIe siècle. Les flibustiers élisent
leur chef et s'il se montre incompétent ou injuste, il risque l'abandon
sur une île déserte. Le capitaine flibustier ne peut jamais aller contre
la volonté de ses hommes. Sauf au plus fort de la bataille, les décisions
capitales sont prises collectivement. Chez les flibustiers le bateau est
un bien commun. Une convention ou «une chasse-partie» (terme dérivé de
charte-partie) règle les rapports entre les hommes. On signe les articles
de la charte en jurant sur la bible, ou à défaut sur une hache, de les
observer. Ce contrat stipule un certain ordre et l'obéissance au chef,
il met en valeur la solidarité et le dialogue. On y établit les compensations
pour les blessures et récompenses pour les actes d'héroïsme. Le mérite,
le courage sont toujours au sommet des valeurs pirates. Dans
la communauté pirate, tout ce qui peut nuire à la cohésion et à l'intérêt
du groupe est interdit : désertion lors du combat, détournement d'une
part du butin, introduction de femmes à bord, les rixes sont interdites
à bord, certaines chasse-parties interdisent le viol. Le quartier-maître,
les gabiers (matelot chargé de l'entretien, de la manœuvre des voiles,
du gréement) et les canonniers sont désignés au mérite. Barème
prévu en cas de mutilation (Antilles au XVIIe siècle) La
perte d'un seul œil est à l'égal de la perte d'un doigt. Parce qu'on peut
se débrouiller plus facilement avec un seul œil qu'avec une main éclopée
! Justice..
ou vengeance ? L'équipage
du pirate Bartholomew Roberts considère cette tâche de «gardien des droits
et libertés contre l'opression des riches et des puissants» suffisamment
importante pour désigner l'un d'entre eux à titre de «dispensateur de
justice». Une sorte de juge officiel chargé d'écouter les plaintes de
l'équipage capturé et de décider des châtiments à imposer aux officiers
dénoncés. Au-delà de vouloir se faire justice, cette habitude favorise
bien sûr le recrutement. Parce qu'après avoir dénoncé leurs officiers
pour comportement tyrannique, les marins n'ont plus d'autre choix que
de passer du côté des pirates. Cependant,
le contraire est aussi vrai. Si l'équipage capturé affirme être bien traité,
les flibustiers vont jusqu'à gracier les capitaines marchands et les officiers.
Parfois même, ils sont récompensés! Ou encore, on négocie une entente.
Il est arrivé qu'un capitaine pirate décide d'exécuter un capitaine marchand
qui s'était trop bien défendu. Quand un des flibustiers s'oppose, disant
qu'il a déjà navigué avec ce marchand qui est juste et bon; le marchand
est gracié. C'est vraiment un brave, parce que plutôt que s'en aller,
il propose aux flibustiers de racheter son navire et sa marchandise. On
négocie, on s'entend sur le prix, et on repart chacun de son côté plutôt
satisfait! Les
flibustiers sont aussi capables d'avoir pitié d'un équipage mal en point.
Un navire complètement délabré est capturé, et devant les conditions de
vie lamentables des marins, on leur offre de se joindre aux flibustiers. Le
grand rêve flibustier : C'était
encore l'époque des rois, ne l'oublions pas, et prétendre qu'une bande
de pirates ont fondé une société où chaque homme vote les lois communes,
où les chefs sont élus pour une période maximale de trois ans, où les
esclaves sont libérés en vertu du principe de l'égalité de tous les humains,
où on aurait même inventé une langue commune à tous... en un mot, ces
idées aujourd'hui banales pouvaient à l'époque vous envoyer en prison.
Le
matelotage
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