Les flibustiers
n'en finissent pas d'étonner. Ils accomplissent leurs exploits étant malades,
affamés et affaiblis par le manque de sommeil.
En
vérité, plus encore que les combats, les maladies tuent les flibustiers.
En général, la moitié des hommes sont malades à divers degrés.
Le
typhus et la typhoïde existent en permanence; le scorbut, la dysenterie,
la malaria et la fièvre jaune complètent le tableau médical peu reluisant.
Et je ne dis rien des nombreuses maladies qualifiées de «honteuses». Pendant
les abordages, il n'est pas rare de voir les hommes se précipiter en premier
sur les coffres à pharmacies afin de pouvoir se soigner.
Blackbeard
a même assiégé une ville de Virginie pendant plusieurs jours pour à la
fin partir avec pour toute rançon un coffre de médicaments!
Avant
lui, le rusé Morgan s'en sort mieux devant La Havane.Il
cache bien aux Espagnols que ses flibustiers sont affaiblis par une épidémie.
Il menace d'attaquer et d'incendier la ville malgré qu'il n'en soit pas
capable.
Et il obtient
une rançon substantielle! S'il y avait des médicaments et des instruments
de médecine à bord des navires pirates, c'est qu'on les avait volés sur
un autre vaisseau.
Et si un des membres de l'équipage savait s'en servir, c'était par le
plus pur des hasards.
Les
plaies s'infectaient rapidement, et necessitaient une intervention chirurgicale.
On saoulait
le patient et on le maintenait allongé, le temps d'amputer le membre atteint.
Ensuite, on recousait le moignon et on stoppait l'hémorragie avec du goudron
chaud.
Quand en pleine jungle, William Dampier tombe malade d'hydropisie (épanchement
de sérosité dans une cavité naturelle du corps, spécialement l'abdomen,
ou entre les éléments du tissu conjonctif), on lui propose deux remèdes
:«les indigènes disent que le meilleur remède pour lutter contre ces fièvres
consiste à boire, après l'avoir dilué dans de l'eau, un testicule ou scrotum
d'alligator réduit en poudre (ils en ont quatre, un près de chaque patte,
sous la peau) ».Imaginez le flibustier grelottant de fièvre qui délire
et patauge dans un marais pour s'attraper un beau gros alligator! Avec
des remèdes comme celui-là, il devait pas y avoir beaucoup de rescapés!
Heureusement pour Dampier, il n'y a pas d'alligator dans la région où
il est.
Arrivant enfin
au bord de la mer, on lui applique le second remède, un peu plus sensé
celui-là : «aussi, m'installa-t-on dans le sable chaud, dont on me recouvrit
tout le corps sauf la tête: je supportai cela presque une demi-heure,
après quoi on m'en dégagea et je restai allongé à transpirer sous une
tente. Je transpirai
extrêmement tout le temps que je restai dans le sable et je crois que
cela me fit grand bien, car rapidement, je me sentis mieux.»